Chaque année, c’est le même rituel : les enfants partent à la chasse aux œufs, les adultes s’offrent des chocolats…
Après Noël, les enfants attendent avec impatience les cloches (ou le lapin) de Pâques et leur cargaison de chocolats. Pour les croyants, Pâques est un évènement au cœur de la foi chrétienne.
Mais d’où vient la coutume des œufs de Pâques ?
Vie et renaissance au cœur des hommes
La coutume d’offrir des œufs décorés, teints ou travaillés, existait bien avant l’ère chrétienne. Comme le printemps est la saison de l’éclosion de la nature, l’œuf, représentant la vie et la renaissance, a été probablement le premier symbole utilisé lors de rituels qui datent de la nuit des temps.
Au printemps, les Égyptiens et les Perses avaient pour habitude de teindre des œufs et de les offrir pour symboliser le renouveau de la vie. – Dans l’antiquité gauloise, les druides teignaient les œufs en rouge en l’honneur du soleil. Dans les rituels païens anglo-saxons, on offrait des œufs colorés à la déesse Eostre. – Plusieurs cultures païennes disposaient des œufs dans les tombes ou les sépultures pour demander la renaissance de la personne décédée.
Pour les Juifs, l’œuf est le symbole de la vie mais aussi de la mort. La libération du peuple hébreu a coûté la vie à de nombreuses personnes, et le bonheur n’est jamais absolu pour les eux. A Pessa’h les Juifs trempent un œuf dans de l’eau salée en souvenir de toutes les larmes versées suite à la perte de leur indépendance.
Puisque Pâques, pour les chrétiens, célèbre la résurrection du Christ eut lieu au printemps, le symbolisme de l’œuf y a trouvé aussi sa place dans les rites familiaux. Cette coutume d’offrir des œufs le matin de Pâques est apparue vers le IVème siècle en Europe, et se retrouva en Egypte autour du XIème siècle, puis en France, en Alsace, vers le XVème siècle.
Dans les cours royales
Progressivement cette coutume populaire va aussi s’instaurer dans les cours royales, mais elle y perdra le véritable symbole qui est le sien. A la Renaissance, l’œuf décoré populaire inspira des artistes : après l’œuf de poule ordinaire, on en confectionna en verre, en porcelaine, en bois… En l’an 1200, sous Edward I en Angleterre, on retrouve, dans la comptabilité du palais royal, la somme de 18 pences versée pour l’achat de 450 œufs qui devaient être peints à la feuille d’or avant d’être distribués aux membres de la famille royale. Les œufs recouverts d’or apportent la richesse à ceux qui les reçoivent.
500 ans plus tard le roi Louis XIV en fait aussi une institution. D’une part, ses gens devaient lui apporter le plus gros œuf pondu en son royaume durant la Semaine Sainte et, lui-même, le jour de Pâques, entouré de grandes corbeilles, distribuait en personne des œufs peints à la feuille d’or à ses courtisans aussi bien qu’à sa valetaille.
La surprise contenue dans l’œuf est une tradition qui remonte au XVIème siècle, et certaines sont même passées à l’histoire tant elles étaient exceptionnelles : c’est le cas de la statuette de Cupidon renfermée dans un énorme œuf de Pâques offert par Louis XV à Madame du Barry, du brûle-parfum trouvé en 1770 par Catherine II ou encore de la minuscule poulette cachée dans un œuf précieux conservé à Copenhague dans les collections royales du château de Rosemborg.
Les œufs de Fabergé
C’est justement ce dernier objet en or massif qui est à l’origine des célèbres œufs impériaux russes que l’on doit à l’imagination de Peter Carl Fabergé, orfèvre du Tsar. En effet, une princesse danoise – Dagmar – épousa le Tsar Alexandre III, prenant le nom de Maria Feodorovna, et décrivit à son mari cet objet qu’elle avait admiré, au château de Rosemborg à Copenhague. Elle en fit la description avec un tel enthousiasme et une telle nostalgie que celui-ci en commanda un tout à fait identique à l’orfèvre de la cour impériale, Peter Carl Fabergé (1846-1920). On était en 1885 : dès lors, tous les ans à Pâques, inventa une nouvelle merveille, de plus en sophistiquée, et l’offrit à sa souveraine.
Cette tradition plaisait beaucoup à Nicolas II qui, couronné en 1896, offrait de splendides exemplaires à sa mère et à son épouse, et on estime qu’entre 1885 et 1916, pas moins de 56 joyaux sont sortis de l’atelier magique de Fabergé.
Avec le temps, la fabuleuse collection des Romanov a été dispersée. Une dizaine de ces œufs de Fabergé sont au Kremlin, deux autres appartiennent à la reine Elizabeth II et 12 autres ont été achetés par Malcom Forbes, éditeur et écrivain américain. Il arrive que quelques-unes de ces oeuvres exceptionnelles apparaissent sur le marché international de l’art et atteignent des prix vertigineux : la dernière vente remonte à 1994, quand Christie’s adjugea le Winter Egg pour 3,5 millions de livres. Ces chiffres tout à fait prodigieux se justifient par le fait que ces objets sont de véritables chefs-d’œuvre, encore que de petite taille.
Mais que ces merveilles ne vous privent pas du plaisir simple de déguster vos œufs en chocolat, qu’ils aient été apportés par les cloches, un lapin, un lièvre ou une cigogne !